Histoire, oublis, récits : plaidoyer pour des mémoires compatibles de la guerre d’Algérie Points de vue d’histoire, points de vue d’artistes. Les Journées du DHTA. Mémoires de la guerre d’Algérie

Intervenant : Catherine Brun

ENS
45 rue d’Ulm, 75005 Paris

Un événement qui mêle conférences, paroles d’écrivains, œuvres et interventions d’artistes plasticiens, réalisateurs de cinéma, acteurs et metteurs en scène, autour de ce conflit dont il a été longtemps difficile de parler, et dont la résurgence est aujourd’hui manifeste dans la recherche et dans les arts.
C’est autour du regard des artistes d’aujourd’hui sur ce moment décisif de l’histoire algérienne et française que nous proposons d’organiser ces journées. L’événement ne se conçoit pas comme un colloque de chercheurs, ni comme une rétrospective historienne sur le sujet, mais il se veut une entrée en matière s’adressant à ceux qui éprouvent le besoin d’un manque à combler, d’un dialogue à relancer : aller à la rencontre de ces artistes - algériens, français, franco-algériens, descendants de combattants des deux bords, de harkis, de pieds-noirs, d’objecteurs de consciences - ou simplement de ces peuples, ces gens, qui ont vécu, et subi, la guerre. Bref, interroger la mémoire, les traces au fil des générations, de la guerre d’Algérie. Comment la, les, ressaisir ? à partir de quoi ? selon quel(s) angle(s) ? pour lui donner quelle(s) forme(s) ? à quel(s) public(s) destiner, enfin, cette mémoire ?

Ces “Journées du DHTA” sont une expérience : issues de la collaboration transversales entre les disciplines représentées au DHTA, mais aussi entre les approches pratiques - artistiques - et théoriques - issues des sciences humaines - elles se veulent la préfiguration d’un Master - le premier master de l’École Normale Supérieure dans le domaine des arts - qui ouvrira en septembre 2019, le master Arts : Théorie et pratique, lui-même transversal, appuyé sur une expertise dans plusieurs arts, et une approche pratique et théorique.

Programme

Exposition permanente : Un travail du plasticien Éric Manigaud, sur les manifestations algériennes d’octobre 1961 à Paris violemment réprimées par la police française.
A partir des photographies de Georges Azenstarck, d´Élie Kagan, de Georges Ménager et du film de Jacques Panijel, les dessins d’Éric Manigaud redonnent à voir l´une des pages les plus sombres de l´histoire française contemporaine. L’exposition est organisée grâce à l’aimable concours de l’artiste, de son galeriste Vincent Sator, et des collectionneurs qui ont acquis les œuvres. L’exposition donnera lieu à une intervention du critique Guillaume Lasserre, samedi à 15 heures.

JEUDI 21 FÉVRIER
École Normale Supérieure,
45 rue d’Ulm
20 heures, au Théâtre
Compagnie Nova / mise en scène Margaux Eskenazi
J’ai la douceur du peuple effrayante au fond du crâne

Second volet d’une investigation théâtrale sur les écritures de la décolonisation pour penser nos identités françaises métissées, J’ai la douceur du peuple effrayante au fond du crâne est une traversée des mémoires, des littératures et des résistances, de l’Algérie coloniale à la France d’aujourd’hui, pour dessiner un des visages de la nation française, faite à jamais d’exils, de métissages, d’imaginaires et de violences tues.
Durée : Environ 2 heures
Distribution : Armelle Abibou, Elissa Alloula, Malick Lamraoui, Yannick Morzelle, Raphael Naasz, Christophe Ntakabanyura, Eva Rami.

VENDREDI 22 FÉVRIER
Ecole Normale Supérieure,
45 rue d’Ulm
Salle des Actes, puis Salle Dussane (projection le soir)

MATINÉE : SALLE DES ACTES
(premier étage de l’escalier A, à droite en entrant)

9H30 -10H30
Introduction : Hélène Blais et Nadeije Laneyrie-Dagen, respectivement Directrice du département d’histoire et Directrice du Département d’histoire et théorie de l’art.

10H30 -12H30
Table-ronde : Écrire avec la mémoire familiale
Modératrices : Anne-Françoise Benhamou, Marion Chénetier-Alev et Françoise Zamour.
Discutants :
- Alice Carré, Margaux Eskenazi, Elissa Alloula à propos de J’ai la douceur du peuple effrayante au fond du crâne.
- Alice Zeniter, écrivaine, auteur L’art de perdre (Flammarion, 2017).
- Damien Ounouri, cinéaste, réalisateur de Fidaï (2014), un film documentaire à la recherche d’un grand-oncle algérien qui s’engagea en France dans l’action violente au service du FLN.
Cette seconde partie de la discussion sera rythmée par des temps de lecture (extraits de l’Art de perdre) et des projections (extraits de Fidaï).

DÉJEUNER :

APRÈS MIDI : SALLE DES ACTES
(premier étage de l’escalier A, à droite en entrant)

14H30-17H30 :
La mémoire qui brûle : la violence pendant la guerre d’Algérie, les silences et les traumatismes.
Modératrices : Hélène Blais et Béatrice Joyeux-Prunel.
- 14 h 30 Raphaelle Branche, professeure d’histoire, université de Rouen : De la torture pendant la guerre d’Algérie à l’embuscade de Palestro : parole d’historienne sur la violence.

- 15 h 15 Armance Léger Franceschi, doctorante en histoire de l’Art, ED 540 / PSL : Les Machines à torture de Daniel Pommereulle, ancien appelé de la guerre d’Algérie.
Quand l’artiste, cinéaste, et poète Daniel Pommereulle (1937-2003) part pour l’Algérie en 1957, il a vingt ans. Son manque de discipline le conduit à Sidi Bel Abbès, dans la Légion où, au dire de sa sœur, sa « punition » consiste à peindre des salles de garde. Il rentre en 1959 à Paris et ne raconte que très peu de choses, ou rien, de l’expérience qu’il a vécue. Et cependant, tout porte à croire que ce qui s’est passé alors et la façon dont il l’a vécu sont une clé de lecture de sa vie et de son œuvre, comme peut-être de celles de nombre d’artistes qui avaient le même âge dans la France des années 1960. Pour tenter de le montrer, on comparera œuvre de Pommereulle avec celle de ses contemporains et on montrera en particulier comment ses projets de machines de torture (les Urgences, 1967) et ses sculptures de bois, de plomb et de lames, peuvent être comprises comme une traduction plastique exemplaire de l’expérience traumatique de la guerre d’Algérie.

- 16h Bruno Boulzaguet, acteur et metteur en scène : De Palestro, spectacle-fiction familiale et autobiographique, aux Mémoires chorales, expériences croisées de récits, entre générations et situations.
Lecture/ spectacle : Mémoire chorale.
Bruno Boulzaguet mène depuis quelques années un travail sur l’impact de la guerre d’Algérie dans la mémoire et sur les relations entre Français et Algériens
Le premier volet, le spectacle Palestro écrit par lui, joué au TH71, à l’Atalante, au Gymnase Marseille, est une fiction autobiographique mettant en scène sa relation personnelle à ce conflit : un père appelé et servant sous les armes 28 mois durant, mais qui n’en parle jamais. Les fils, à sa mort, héritent de sa guerre comme s’ils l’avaient faite, et de ses blessures comme s’ils les avaient subies.
Le 2ème volet, Mémoires chorales, est un spectacle / enquête sociologique, photographie instantanée et kaléïdoscope de témoignages collectés dans le secteur géographique du théâtre ou des structures dans lesquelles il est joué : des anciens combattants (ils auront bientôt disparu) ; des personnes qui ont été enfants pendant la guerre ; des fils, filles, femmes, petits-fils, d’anciens combattants algériens, de harkis, de pieds-noirs, ou de métropolitains objecteurs de conscience… L’espace théâtral y est utilisé comme médium non plus d’une narration personnelle, mais des récits d’autrui : un tremplin pour faire accéder à l’espace public ce qui enfoui, caché, intime et, à travers le tissage des paroles, tenter avec les paradoxes de notre diversité, une parole collective, qui puisse avoir une vertu cathartique. .
Mémoires chorales a été joué à Malakoff, à Marseille, en bibliothèque, en médiathèque, à Paris à l’Institut des Cultures d’Islam, au Théâtre de l’Etoile du Nord, au Théâtre de l’Atalante. Parce que les musiques se mélangent plus facilement que les peuples, les témoignages sont ponctués de musiques, chansons d’époque ou en rapport avec le sujet : Lili Boniche, Brel (La Colombe), Vuan (Le Déserteur), Gainsbourg (La Marseillaise), Only You des Platters… La forme est brève, une heure, conçue pour deux jeunes acteurs et un guitariste ; elle est ici présentée dans une version encore un peu raccourcie – 35 minutes.

Distribution :
Aurélien Piffaretti : jeu, guitare et chant
Guillaume Jacquemont : jeu et chant

17 h 15 « GOUTER » :
en rotonde (accès par l’amphithéâtre Dussane,
ou depuis la cour d’entrée : rez-de-chaussée, pavillon de gauche)

SOIRÉE : AMPHITHÉÂTRE DUSSANE

18h00 ? Projection, L’autre côté de la mer, suivie d’un débat avec la réalisatrice Dominique Cabrera.
Modératrices : Marie Pierre-Bouthier et Françoise Zamour.

23 FÉVRIER
École Normale Supérieure,
45 rue d’Ulm

MATINÉE
Histoire, écriture et cinéma : la guerre d’Algérie au risque de la narration
(Salle des Actes, premier étage de l’escalier A, à droite en entrant)

10 h
Modératrice : Anne-Françoise Benhamou
- Catherine Brun, professeure à Paris III : Histoire, oublis, récits : plaidoyer pour des mémoires compatibles de la guerre d’Algérie

10h45
- Jean-Baptiste Naudet
Modératrice : Françoise Zamour

11h30 -13h 00
Table ronde : La guerre d’Algérie au cinéma, les problèmes d’une reconstitution
Modératrice : Marie Pierre-Bouthier
- Salima Tenfiche, doctorante à Paris VIII : le paysage cinématographique algérien et les productions officielles.
- Narimane Mari, cinéaste, réalisatrice de Loubia Hamra
- Lyès Salem ou Rachid Bouchareb

La table ronde sera rythmée par des projections d’extraits.

DÉJEUNER

APRÈS MIDI
Au prisme des arts plastiques
(SALLE DES ACTES, premier étage de l’escalier A, à droite en entrant)

14H30- 16H00
La prise en charge par l’exposition : les œuvres, le public, la censure
Modératrices : Nadeije Laneyrie-Dagen et Armance Léger-Franceschi
- Guillaume Lasserre, critique d’art / Eric Manigaud, 22 dessins pour Charonne : quand il devient impossible de se voiler la face.
- Fadila Yahou, doctorante, Paris I : Évitements, concordances… et discordances : les expositions et la guerre d’Algérie.

PAUSE
16H30_18H
Modératrice : Françoise Zamour, Luc Vigier
Histoire de la guerre d’Algérie, et autres romans graphiques.
- Christophe Jacquet, graphiste : Le récit d’une histoire éditoriale singulière : Pour Jean Senac, livre-hommage à un poète homosexuel et indépendantiste, élaboré avec les élèves de l’école des arts décoratifs d’Alger.

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