« Life in a small town » : Milton Rogovin au Chili Article - 2015

Aubert Didier

Didier Aubert
Aubert Didier, « « Life in a small town » : Milton Rogovin au Chili  », Transatlantica. Revue d’études américaines/American Studies Journal, numéro spécial La photographie documentaire, 2015

Résumé

En février 1967, le photographe engagé Milton Rogovin (1909-2011) vint passer deux semaines sur l’île de Chiloé, sur les conseils du poète Pablo Neruda, pour y photographier, selon ses propres termes, « la vie d’une petite ville » chilienne. Plusieurs versions incomplètes de ce travail ont été publiées, mais c’est de l’échec relatif qui nous intéressera ici. Le paradoxe qui guide cette courte analyse tient en quelques mots : l’examen des photographies produites par Rogovin, qu’on les considère isolément ou dans leur ensemble, laisse une impression inattendue de désengagement politique. Il s’y esquisse une sorte de pastorale chilienne, qui paraît surprenante dans le contexte de la Guerre Froide, alors même que Rogovin et Neruda démontrèrent à de nombreuses reprises leur détermination et leur courage au moment de défendre leurs convictions marxistes. On s’attachera ici à proposer une première piste d’explication à l’absence du politique dans ces images de Chiloé. Après un bref rappel des trajectoires personnelles de Neruda et de Rogovin, on s’attardera sur la formulation même du projet, ce portrait d’une « petite ville », qui pose d’emblée ses propres limites, et qui rencontre pourtant un écho immédiat chez Neruda : au photographe nord-américain en quête d’une communauté idéale préservée des ravages de la modernité, le poète propose d’explorer une île hors du temps et de l’histoire. Cette convergence de vues à deux extrémités du continent culmine en une entreprise emblématique de la tradition humaniste et universaliste du documentaire américain des années 30, à une époque où elle est à la fois redécouverte et remise en cause. L’analyse de la photographie la plus emblématique de la série produite par Rogovin, le portrait d’une jeune mère nommée Sylvia Huentelicán, nous servira à en définir les contours.

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