Les éditeurs bibliophiles : l’amateur comme créateur de livres (1890-1914) Article - 2019

Anne-Christine Royère, Julien Schuh

Anne-Christine Royère, Julien Schuh, « Les éditeurs bibliophiles : l’amateur comme créateur de livres (1890-1914)  », Histoire et civilisation du livre - Revue internationale, numéro spécial L’histoire littéraire des bibliophiles (XIXe-XXe siècles), Genève : Librairie Droz (ed.), 2019, pp. 35-55. ISSN 1661-4577

Résumé

Refusant l’industrialisation de la reproduction du texte et des images, une catégorie d’éditeurs amateurs voit le jour dans le dernier tiers du XIXe siècle. Focalisés avant tout sur la matérialité artisanale et artistique des ouvrages, ils inventent une « bibliophile créatrice » dont Henri Béraldi a dressé les contours dans la série d’articles qu’il lui a consacrée dans la Revue Biblio-iconographique, répondant ainsi à la question posée par Uzanne quelques années plus tôt dans cette même revue : « Quelle pourrait être la nouvelle orientation des bibliophiles ? ». Accusés à l’orée des années 1930 de faire courir les plus grands dangers « à la culture intellectuelle » à cause de leur « superstition du livre » les poussant à succomber à ses charmes matériels au détriment « de la littérature qui s’y trouve » (Louis Dimier), ces hommes, issus des mondes de l’édition, de l’art, de la bibliophile et de la littérature n’en ont pas moins mis en en place une production raisonnée du beau livre. Cette étude formule l’hypothèse que, derrière l’apparente diversité de ces éditeurs, un ensemble de pratiques et de valeurs permet d’unifier cette « bibliophilie créatrice ». Elle s’autorise tout d’abord de la figure de l’amateur promu au rôle d’architecte du livre, croisant par là même les valeurs de la bibliophilie traditionnelle et les pratiques éditoriales contemporaines. Elle fonde ensuite son action sur le rejet du marché industriel du livre, optant pour la concentration en termes de moyens, de structures, mais aussi de réseau, l’amateur s’adressant à son semblable au sein d’une communauté restreinte. Enfin, elle fonde son identité et son auctorialité éditoriales en s’assurant une visibilité médiatique maximale, créant de toutes pièces un marché reposant sur ses propres instances de légitimation et de médiatisation. C’est cette spectacularisation des productions qui contribue, fondamentalement, à l’autonomisation du champ du livre de luxe.

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