Shi to imêji – Mararume ikô no tekusuto to imêji [Poésie et image en France depuis Mallarmé] Ouvrage - 2015

Marianne Simon-Oikawa (dir.), Shi to imêji – Mararume ikô no tekusuto to imêji [Poésie et image en France depuis Mallarmé], Suiseisha, 2015

En France, le XIXe siècle marque une période d’approfondissements et de renouvellements dans les relations entre poésie et image. Dans ce contexte, le rôle de Mallarmé apparaît comme essentiel.
La première section, intitulée "De l’image au livre", est consacrée à Mallarmé. La relation du poète avec Manet est bien connue, mais Miura Atsushi l’aborde ici d’une manière originale en l’envisageant du côté du peintre, et non du poète comme on le fait généralement. Abordant plus particulièrement les apports de Mallarmé à l’histoire du livre de poésie, Hélène Campaignolle-Catel montre pour sa part que ses oeuvres inaugurent les tendances majeures du livre de poésie jusqu’à aujourd’hui, même si les modalités de création et les formes du livre se sont depuis considérablement transformées : le support matériel ne se limite plus à celui de pages cousues ensemble, les mises en page, les espaces, les écritures, inaugurent de nouvelles relations entre textes et images.
C’est à l’étude de ces relations qu’est consacrée la section suivante, "L’image dans le livre". Marianne Simon-Oikawa s’intéresse ainsi au cas de Pierre Albert-Birot, dont l’oeuvre fut à bien des égards pionnière dans les années vingt. On ne saurait d’ailleurs trop insister sur le rôle des années dix et vingt dans les relations entre poésie et image. Le collage, le photomontage et le ready-made, issus d’expériences menées au cours de cette période, continuent de nourrir la création des poètes. C’est le cas de la poésie visuelle de Jean-François Bory, qu’analyse Gaelle Théval : elle recourt fréquemment à l’insertion d’images renvoyant aux domaines de l’écriture et du livre.
La co-présence d’un texte et d’une image ne saurait se ramener au seul cas de l’illustration. Associer un texte à une image est un toujours phénomène complexe, qu’aborde la troisième section. Suzuki Masao, étudiant le cas de gherasim Luca, montre que dans ses collages, ses dessins aux points et ses livres-objets, les relations entre le visible et le lisible (l’image et son titre, la forme figurée et les mots qu’elle contient, etc.) se trouvent sans cesse réinventées et doivent être interprétées à plusieurs niveaux. Dans son analyse des dessins réalisés par Roger de La Fresnaye pour les Illuminations de Rimbaud, publiés de manière posthume en 1949, Taniguchi Madoka montre que le peintre cubiste n’a pas cherché à rendre les mots de tel ou tel poème, mais bien plutôt à retrouver l’atmosphère de l’ensemble, dans des tracés abstraits caractérisés par la perspective et la fragmentation.
Abordant la relation des poètes avec les peintres, comment ne pas parler de Picasso ? La quatrième section du présent ouvrage lui est consacrée. S’il nourrit de nombreuses réserves envers l’illustration, comme le rappelle Serge Linarès, Picasso sait aussi les dépasser lorsque les projets qui lui sont proposés lui permettent d’expérimenter de nouvelles techniques, ou de revisiter un univers qui l’attire, en s’y investissant et en le détournant. Chiba Fumio analyse pour sa part la série de portraits de Leiris par Picasso, si différents de ceux réalisés par Masson ou Giacometti.
La dernière section de ce livre s’intéresse à la réflexion des poètes sur l’image et à certains jeux que celle-ci leur permet. Tsukamoto Masanori analyse ainsi la réflexion de Valéry sur la photographie. Ce n’est pas en théoricien mais en praticien de l’image, que Jacques Prévert aborde, lui, la photographie. Si on connaît bien son oeuvre de scénariste de cinéma, on sait moins que le poète créa des livres avec des photographes. Il réalisa aussi de nombreux collages, à partir d’images détournées de leur usage premier, et d’étonnants éphémérides, qu’analyse Carole Aurouet, et où il exprime avec d’autres moyens que dans ses textes mais avec la même force son attachement à l’amour et à la liberté.

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