Culture spectaculaire et premier cinéma Séminaire de recherche 2023-2024

Organisateurs : Patrick Désile, Valérie Pozner

Comiques

« Au premier regard, le cinéma a donc créé un comique spécifique, inconcevable avant lui, visuel de nature et tiré de ses seules ressources techniques. Pourtant, très vite, il doit avouer sa dette envers l’art du spectacle, en ce qu’il a d’essentiel et de primitif : l’art du clown, de l’acrobate, du jongleur et de l’illusionniste. »
C’est ainsi qu’un ouvrage de référence, l’Encyclopaedia Universalis, présente la situation du premier cinéma comique. Situation paradoxale : au « premier regard », il ne devrait rien à ses devanciers, mais « très vite », on s’apercevrait qu’il leur est redevable ; pas à n’importe lesquels d’entre eux, d’ailleurs : au cirque, sans doute, au café-concert, aux spectacles de la fête foraine…
On peut considérer, à vrai dire, cette apparente contradiction comme constitutive d’une sorte de mythe fondateur (qui intéresse d’ailleurs le cinéma en général et dont on pourrait trouver bien d’autres formulations, plus ou moins anciennes et plus ou moins savantes). Le cinéma ouvre une ère nouvelle, vaguement vêtu d’abord des oripeaux du clown ou de l’excentrique de café-concert, dont il se dépouillera bientôt. C’est qu’il doit paraître à la fois absolument neuf mais héritier aux mauvaises manières, aux façons populaires, décousues, heurtées, physiques, « primitives », enfin. Bientôt viendra le temps de la pleine autonomie : « Enfin Max Linder vint et le premier en France… »

On s’interrogera sur la fonction d’un tel mythe historiographique et sur sa viscosité (car il persiste malgré les travaux qui viennent incessamment le contredire), mais on doit, d’abord, observer qu’il occulte et falsifie une part immense de la culture spectaculaire du XIXe siècle. Il caricature paresseusement, infantilement, le cirque, le café-concert, les spectacles forains, qu’il prétend ériger en premiers inspirateurs et dont il ignore soigneusement les composantes dramatiques, narratives. Il méconnaît délibérément le rôle formatif du théâtre,
notamment de ce « vaudeville », traditionnellement exécré par les historiens du cinéma. Il laisse dans l’ombre, enfin, mille aspects de cette culture comique effervescente, profuse, diverse, dont les acteurs du premier cinéma
étaient imprégnés.

Ce séminaire, se déprenant du mythe, voudrait jeter quelques lueurs sur cette culture comique de la fin du XIXe siècle, et se demander simplement, mais après coup, comment le premier cinéma s’y inscrivit.
Les séances auront lieu un mercredi par mois de 16 à 18 h à l’Institut national d’histoire de l’art, 2, rue Vivienne (75002 Paris), salle Benjamin, en présence et en visioconférence.

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